L'école ne m'a pratiquement jamais posé de problème. Ma famille était très positive à son égard, mon grand-père et mon grand-oncle, du côté de mon père, étaient des instituteurs à l'ancienne. Ils étaient la preuve vivante que l'école est un ascenseur social, et nombre de mes cousins se vouaient également à l'enseignement.
Mon père avait suivi des études supérieures, ce qui n'était pas courant avant la 2e guerre mondiale. Il avait suivi un institut de commerce et était comptable certifié. Cela lui permettait de vivre honnêtement, et c'est même grâce à cette situation que la famille avait pu construire, en 1953-54, une petite villa à Lucens. Mais il ne se sentait pas parfaitement à l'aise dans cette profession, où il avait occupé pourtant des places relativement importantes d'abord à Fibre de verre de Lucens, puis dans une fonderie à Lausanne.
C'est dans ce dernier poste qu'il a finalement décidé de céder à la vocation familiale, en 1962 environ. C'était l'époque où régnait une terrible pénurie d'enseignants dans le canton, en raison de l'explosion démographique, et le département faisait des campagnes de recrutement auprès de candidats déjà engagés professionnellement.
Mon père s'est donc lancé dans une formation complémentaire lui offrant une passerelle vers le monde pédagogique. La première année se suivait en cours d'emploi, et la seconde à plein temps. Même si les "étudiants" touchaient une indemnité, cela correspondait à une grosse diminution des revenus de la famille, et c'est l'époque où j'ai commencé à ressentir les difficultés financières de mes parents.
Après deux ans de formation, mon père a accédé au titre d'instituteur, et son premier poste a été Yverdon. Les premiers temps, il a fait les trajets, et a dû racheter une voiture. Nous avions précédemment renoncé à la voiture durant cette période difficile, alors que nous avions précédemment eu une Topolino (à 5 dedans, y compris la poussette de mon petit frère !) puis une Renault 4 CV et sauf erreur deux WV, dont la première avait encore les flèches et les deux petits oeufs comme vitre arrière. En tout cas, mon père a acheté une 2CV, qui était une voiture à la fois très populaire mais qui avait également, à l'époque déjà, une image de liberté et de non-conformisme.
Lorsque mon père a été nommé officiellement à Yverdon, toute la famille a déménagé dans la "capitale du nord-vaudois", et nous avons commencé à vivre la vie habituelle d'une famille d'enseignant. J'ai heureusement évité d'être dans la classe de mon père, puisque j'étais au collège, mais mon petit frère Jean-Français a pu apprécier ce genre de joyeusetés durant plusieurs années ! Mon père était certes très sévère, mais je suis persuadé qu'il était un excellent enseignant, très sensible à la réussite de ses élèves. Il a d'ailleurs été volontaires pour mettre sur pied une filière commerciale lorsque l'école primaire à ouvert ses premières options pour tenter d'améliorer la formation de ceux qui n'avaient pas réussi à aller en Prim'Sup.
En ce qui me concerne, mon cursus scolaire a été régulier:
- Ecole enfantine à Lucens
- Ecole primaire à Lausanne, au collège de Prélaz
- Collège secondaire en latine à Lausanne, au Belvédère, puis à Yverdon
- Gymnase à Lausanne en latine, au Belvédère
- Université à Lausanne, en Sciences sociales et politiques